Dès le premier titre qui donne son nom à l’album (Dolce Divertimento), on est plongé au cœur d’une musique chatoyante : la flûte, telle un oiseau sur la branche, virevolte et lance à la volée son chant clair admirablement soutenu par une guitare acoustique. A mi-chemin entre un folklore populaire et un classicisme romantique, la musique évoque un monde médiéval fantaisiste où les champs jaunes sont ensemencés de cités féeriques dont les tours abritent des histoires d’amour courtois. Ce sentiment d’arpenter un artefact du passé prévaut sur toute la durée de cet album inclassable. Steve Houben, connu pour ses participations à des projets divers s’inscrivant aussi bien dans le jazz que dans la musique folklorique ou classique, s’avère évidemment le partenaire idéal pour enluminer les subtiles compositions d’Alain Pierre. Ce dernier est aussi un guitariste inspiré qui, surtout quand il s’exprime sur une douze cordes, rappelle par son jeu en accords une esthétique proche de celle de Pat Metheny à l’époque de New Chautauqua. Le succès d’un tel projet dépendant aussi beaucoup de la qualité de la production, celle-ci a été confiée à Maxime Blésin qui a orfévré un mixage contrasté mettant en valeur la dynamique et les autres vertus des instruments. Douce et mélancolique (L’étang Des Iris, Lost Roadbook) ou enjouée et capricieuse (Dolce Divertimento, In A Hectic Mood), la musique convie à une écoute attentive et dilate le temps en installant une ambiance relaxante propice à la rêverie. Sans effet intempestif et avec une extraordinaire simplicité, les deux musiciens nous entraînent à contre-courant un peu plus à l’Ouest, hors du formalisme du jazz, vers une musique de chambre ou plutôt d’une chambre dont les portes sont grandes ouvertes sur un univers troubadour à la fois poétique, envoûtant et aussi tendre qu’une chanson d’amour.
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