Tout d'abord, il y a Fabien Degryse, un guitariste trop méconnu hors de son terroir, concepteur d'une méthode efficace d'improvisation (
L'improvisation jazz par les arpèges aux Editions Combre), interprète hors pair capable de mettre le feu dans un festival en reproduisant des solis de légende, compositeur d'une musique souvent originale et inspirée comme celle de son disque Medor Sadness paru en 1992 et malheureusement aujourd'hui introuvable dans les bacs (mais bien sur
Internet). Ici à la guitare acoustique et à la balalaïka, Degryse est omniprésent, à la fois assez respectueux et sensible pour faire passer l'émotion dont sont encore chargées ces vieilles rengaines et assez inventif pour allumer l'étincelle propice à leur relecture. Le deuxième homme, c'est Jean-Louis Rassinfosse dont la contrebasse, admirablement mixée, remplit tout l'espace avec une sonorité pleine et ronde. Et le trio est complété par le saxophoniste Pierre Vaiana qui joue d'une manière déliée, avec un phrasé décontracté et délicat. Il faut écouter ce
Mourir pour des idées, avec son thème exposé à la contrebasse, détourné en blues avec un Fabien Degryse qui se la joue à la Eric Clapton unplugged. Ou ce
Fernande esquissé en farandole avec beaucoup d'humour. Ou encore cet extraordinaire
Bonhomme en forme de chanson folklorique qu'aurait pu interpréter le défunt Pentangle de Bert Jansch et John Renbourn. Tous les guitariste amateurs qui se sont un jour tordus les doigts sur ces chansons de Brassens apprécieront le travail d'improvisation et de relecture élaboré par ces trois hommes. Si tous les thèmes restent bien reconnaissables, leur traitement est suffisamment original pour retenir l'attention de l'auditeur du premier au dernier sillon, ce qui pouvait sembler plus facile pour certains titres plus prédestinés à un traitement jazz (Les amoureux des bancs publics) que pour d'autres qui, sans leurs merveilleuses paroles, ne sont plus que des scies pour les feux de camp (chanson pour l'Auvergnat). Tout cela nous fait un disque fort réjouissant propice à réchauffer le cœur et l'âme à la manière d'un feu de joie. Et si Georges avait pu entendre cette musique avant d'être conduit à travers ciel au Père Eternel, c'est sûr qu'il aurait aimé ça.