Compacts de Jazz Belge :
Autres Suggestions (4)




"Jazz is World Music in the best possible sense.
Ever since the emergence of jazz in the multicultural
melting pot of New Orleans it was basically a mixture
of music from Africa and Europe."

Siegfried Loch, producteur et fondateur du label ACT



  1. Marc Lelangue : Greenville (IGLOO IGL 150), 2001. Difficile ici de distinguer les compositions originales de celles empruntées à des bluesmen traditionnels comme Blind Boy Fuller, figure légendaire de la Côte Est dans les années 30, où du chanteur et guitariste louisianais Snooks Eaglin. Lelangue chante son country-blues d'une voix traînante et brisée, sans se forcer et bien calé dans l'esprit et la forme. Il est merveilleusement accompagné par un groupe décontracté dans lequel brillent ici et là l'harmonica de Steven De Bruyn ou la guitare de Kevin Mulligan. Son jeu en slide sur les cordes d'acier d'une antique National réveille d'anciens et mythiques clichés chers à tout amateur de blues. Tel celui d'un train à vapeur qui sillonne les basses terres en crachant sa fumée blanche contre le ciel bleu, symbole de la vie qui passe en ne laissant que des cendres. Merci à Lelangue et à ses amis pour ce coup de blues acoustique et authentique. [ Commander ]

  2. Alchimie (IGLOO IGL 153), 2001. La filiation dans la musique d'Alchimie, il faut la chercher chez Aka Moon et peut-être plus encore chez Deep In The Deep. Ce n'est certes pas sans raison que ce disque est dédié au guitariste Pierre van Dormael dont on retrouve ici la manière impressionniste de tisser des notes claires en une trame colorée et vivante. Et la rythmique sèche, précise et omniprésente - écoutez ce solo du batteur Renaud Person sur Fote Bayefall - renforce encore cette impression de syncrétisme à l'école de Steve Coleman. Ceci dit, Alchimie a sa touche bien personnelle. Nicolas Kummert est un saxophoniste passionnant au son bien plein qui rappelle parfois les grands ténors des années 50. Et Philippe Reul, dont le soutien rythmique apparaît comme essentiel, a aussi sur sa guitare des envolées rugissantes, concises et ravageuses comme un tsunami. Quand à la musique dans son ensemble, elle se révèle comme plus mélodique, plus variée en ce qu'elle incorpore des éléments rock ou funky (Spieglein) sans oublier le lyrisme profond de ces bien belles ballades que sont Vague et Tempête ou Two Elephants Are Always Right. Alchimie : un disque à écouter et un groupe à soutenir. [ Commander ]

  3. Charles Loos - Weber Iago : O Sonho e o Sorriso (IGLOO IGL 160), 2000. Et revoilà Charles Loos avec son piano scintillant, ses tempos bien cadencés et ses ritournelles favorites (Parfum Latin). Grand fervent des duos en tout genre, Loos a cette fois invité le brésilien Weber Iago, un pianiste de formation classique, également compositeur, qui vit et travaille aux Etats-Unis. Trois compositions de Iago, cinq de Loos et on se retrouve avec un compact full of piano, le Steinway de Loos à gauche et Le Bösendorfer de Iago à droite. L’ambiance générale reste du Loos assez typique. Le volume est puissant et la musique est estampillée d’un jeu à la main gauche imposant, caractéristique des pianistes qui ont l’habitude de se passer de bassistes. Mon tout donne un jazz (?) de chambre sans esbroufe, la technique sans faille des musiciens étant intégralement mise au service de cette musique assez particulière, où lyrisme et fougue s’allient avec bonheur, et que les amateurs de Loos reconnaîtront dès les premiers accords. [ Commander ]

  4. Jean-Louis Rassinfosse : Crossworlds (IGLOO IGL 156), 2000. Depuis ses célèbres enregistrements avec Chet Baker dans les années 80, Jean-Louis Rassinfosse a participé à une multitude de projets et est devenu aujourd’hui le contrebassiste le plus connu et l'un des plus appréciés de la scène jazz belge. Etrangement, il n’avait encore jamais enregistré sous son propre nom. C’est chose faite avec ce magnifique Crossworlds qui réunit, autour de la rythmique qu’il compose avec le batteur Bruno Castellucci, les membres de deux groupes dont il fait partie depuis de nombreuses années. D’un côté, le pianiste allemand Klaus Ignatzek et les trompettistes Claudio Roditi et Gustavo Bergalli et de l’autre, le saxophoniste Pierre Vaiana et le guitariste Fabien Degryse du trio L’Ame des Poètes. Quelle fraîcheur dans l’exposé des thèmes ! Quelle fluidité dans les improvisations ! Quelle alchimie dans l’agencement des sons ! Rassinfosse, maillon réunificateur, enveloppe son septet dans une sonorité ronde et chaleureuse qui contribue à la lisibilité de l’ensemble. Et même si en plus d'une interprétation du Que reste-t-il de nos amours de Trenet (les Poètes restent les Poètes même avec deux trompettes), chacun a amené dans ses cartons une de ses compositions, le disque dans son ensemble garde une étonnante homogénéité. Cette musique mainstream est sans âge : elle coule comme un bon cru arrosant un festin auquel l’auditeur ne peut qu’être heureux d’avoir été convié. [ Commander ]

  5. Slang : Save the Chilis (Carbon 7 C7-062), 2001. Slang est un trio aux confins du rock, du jazz, du funk et de la World Music. A cause de la basse électrique rageuse de François Garny, saturée et mixée en avant, les premiers titres évoquent les fameux power trios des sixties : Jack Bruce avec Cream ou même Noel Redding avec le premier Jimi Hendrix Experience (les riffs de Yukun Slang ont d’ailleurs des réminiscences du Purple Haze d’Hendrix et même les paroles en sont aussi évocatrices : Hey my friend ... look at this ... Etc.) L’atmosphère se détend avec La Trilogie d’Apu, une superbe mélopée orientale et envoûtante de 11 minutes mettant bien en valeur le saxophone de Manuel Hermia ainsi que les percussions de Michel Seba. Belle ambiance encore avec Oude Fox et Nana très lancinants avant de revenir au rock funky avec Hombre Feli’, Save the Chilis et La Gigue. Slang occupe un créneau diversifié et peut être écouté par un public assez large, ce qui est un avantage. On verrait bien dans le futur le groupe évoluer en quartet avec l’ajout d’un guitariste dans le style d’Allan Holdsworth ou mieux de John Abercrombie (celui de Gateway) – je me souviens d’une excellente prestation au Jazz Marathon 99 d’un groupe plus étendu avec Pierre Van Dormael à la guitare. Quoi qu’il en soit, il y avait une place à prendre dans une niche musicale encore pratiquement vierge au sein du microcosme jazzistique belge et elle est prise ! [ Commander ]

  6. Trio Grande : Signé Trio Grande (WERF 028), 2001. Huit ans plus tard, voici le deuxième opus du Trio Grande. Imaginez un peu cet ensemble hétéroclite hors normes : Michelle Debrulle aux drums et à la « grosse caisse de Binche », Laurent Dehors aux saxophones, aux clarinettes et à l’orgue et Michel Massot, maître es tubas et trombones. Au hasard des plages, on pense à Charles Mingus, à Roland Kirk ou à Archie Shepp et puis on se dit que c’est une danse envoûtante échappée de la steppe africaine ou alors la bande son du Retour de Martin Guerre, ou Grand Funk Railroad, ou plutôt non, c’est Louis Sclavis qu’il faut évoquer à moins que ce ne soit Michel Portal (là on se rapproche à mon avis). Finalement, Trio Grande, c’est tout cela en même temps et sûrement plus encore. De toute façon, ce que ces trois poly-instrumentistes débordant de technique, de liberté et d’émotion peuvent créer ensemble est tout bonnement indescriptible. Alors, écoutez ce disque ou allez les voir sur scène sauter comme des puces d’un instrument à l’autre et entrez dans leur monde décalé. Ca sort des sentiers battus et ça fait du bien. [ Commander ]

  7. Brussels Jazz Orchestra : The Music of Bert Joris (WERF 029 - 030), 2001. Un nouveau disque du Brussels Jazz Orchestra est toujours un événement. Celui-ci est consacré à la musique du trompettiste Bert Joris dont la renommée internationale s'est considérablement étendue après sa magistrale collaboration au Blue Prince de Philip Catherine. Deux compacts, près de 110 minutes de musique, 13 compositions originales peaufinées avec un soin maniaque. Des solos de Bert Joris lui-même, Christoph Erbstösser (p), Gino Lattuca (tp), Kurt Van Herck (ts), Laurent Blondiau (bugle), Frank Vaganée (as) et d’autres parsèment ces arrangements débordant d’imagination captés lors de deux concerts consécutifs au De Werf en septembre de l’année dernière. L’amateur de jazz va en avoir pour son argent et il lui faudra bien jusqu’à l’été pour percer à jour toutes les subtilités dévoilées ici. En plus, le son est énorme et l’orchestre dynamite l’espace sonore. Tout cela ne laisse qu’un seul regret : celui de ne pas avoir été dans le public ces deux soirées-là. [ Commander ]

  8. Aka Moon : Invisible Moon (Carbon 7 C7-061), 1998 - 2000. Sur Invisible Mother, Aka Moon fusionnait avec l’ensemble Ictus pour créer une musique contemporaine aussi singulière que magistrale. Le groupe se muait ensuite en grand orchestre et revenait au jazz sur Invisible Sun, un de leurs meilleurs compacts. Et pour finir, voici enfin Invisible Moon dont les enregistrements datent déjà de 2 à 4 ans. Cette fois, le groupe y joue …. du Aka Moon tout simplement. Recentrée sur l’exploration des rythmes, les références indiennes et les solos tendus de Fabrizio Cassol, la musique n’a pas fondamentalement changé mais, si l’on n’est pas surpris, on reste quand même conquis. Les amis indiens, aux percussions et au violon, ont été invités pour quelques titres de même que le guitariste David Gilmore, Benoît Delbecq pour les claviers, et David Linx qui chante sur un seul titre (Three) et dont la prestation tout à fait remarquable n’est pas sans rappeler Soft Machine ou le Matching Mole de Robert Wyatt. Si l’énergie est toujours là, l’atmosphère dans l’ensemble paraît plus sereine que sur les deux volets précédents. Le disque s’écoute avec un réel plaisir et referme dignement cette trilogie des planètes invisibles. [ Commander ]

  9. Mattis : Heap of Comfort (LYRAE Records), 2001. Dès le premier titre, Daïquiri, on se croirait projeté une trentaine d’années en arrière, au temps où le jazz se mêlait au rock pour des incandescences électriques orchestrées par des Return To Forever, Mahavishnu Orchestra, Billy Cobham et autres Stanley Clarke. Pourtant, au fur et à mesure des plages, la musique tout en restant électrique se diversifie, intégrant ici des pulsations tranchantes louchant sur le M’Base de Steve Coleman (Façon De Parler et Orangeor) et là des structures harmoniques plus complexes (Ode à Lysque) permettant aux solistes de mieux se mettre en valeur. Nicolas Dory, qui est le compositeur de tous les titres, s’affirme aux saxophones - ténor et alto - comme un talent prometteur tandis que Marco Locurcio, qui nous avait déjà séduit lors d'une précédente aventure discographique en compagnie de Peter Hertmans (Buddies, 1997), confirme sa capacité à jouer aussi bien des notes que des timbres, un peu à la manière d’un John Abercrombie. Quand au Fender-Rhodes de Josef Dumoulin, Mattis lui doit quelque part son style et sa couleur. Les amateurs de jazz-rock ou funky et des musiques dérivées devraient y trouver leur compte.

  10. Philippe Aerts Quartet : Back to the Old World (IGLOO IGL 162), 2001. Après s’être fait connaître sur la scène belge et enregistré un premier compact réussi sous son nom qui date déjà de 1995 – Cat Walk (Igloo IGL 116) – le contrebassiste Phlippe Aerts s’envolait fin 1997 pour New York où il allait mettre son talent au service de la pianiste et compositrice Toshiko Akiyoshi et de Lew Tabackin, jouant aussi à l’occasion avec des maîtres comme Bill Stewart, Nicholas Payton ou Tom Harrell. De retour en Europe, on le retrouve dans différents combos chez Bert Joris, Philip Catherine, Michel Herr et récemment au sein du Decaband de Martial Solal. Sur le plan discographique, il reprend les choses là où il les avait laissées en enregistrant Back To The Old World en droite ligne du précédent. John Ruocco est toujours au ténor et à la clarinette, Tony Levin à la batterie et le trio est cette fois complété par celui qui entre-temps est devenu l’un des meilleurs trompettistes de la scène belge : Bert Joris. La contrebasse, bien mixée en avant, permettra aux amateurs d’apprécier la sonorité et les subtilités du leader. La musique, essentiellement des compositions nouvelles hormis deux titres dont un Giant Steps jouissif avec sa belle partie de clarinette, reste un bop accessible joué avec aisance et naturel dans l’esprit d’un jazz que l’on a voulu d’abord direct et efficace. Un jazz sans âge exempt de futilité et d’esbroufe. Vivant, c’est tout ! [ Commander ]

  11. Musique à Neuf : Traces (IGLOO IGL 164), 2002. Ce nouveau projet propose treize miniatures issues d’un croisement original entre la musique folklorique européenne et la musique improvisée. Arrangé par Pirly Zurstrassen (piano) et Luc Pilartz (violon et cornemuse), ce patchwork de compositions originales ou empruntées à des folklores aussi divers que ceux d’Irlande, de Moldavie ou de Turquie, se lit comme un carnet de voyage. A la simplicité et à l’intimité des duos répondent de savantes orchestrations où prennent vie, libres comme des rafales de vent, de superbes envolées de saxophone (Daniel Stokart), de clarinette (Kurt Budé) ou d’accordéon (Manu Comté). Toujours exquise et gracieuse, joyeuse et lyrique, cette promenade dans le temps et l’espace n’est pas seulement originale et légère comme une bulle aux mille reflets, elle est magique. Marchez sur les traces de cette musique à neuf : elles vous conduiront là où vous n’êtes jamais allé !

  12. Alexandre Furnelle Quartet : Le Chant des Sirènes (Mogno Music J013), 2003. Alexandre Furnelle a réuni autour de sa contrebasse un quartet efficace pour interpréter avec élégance ses compositions variées et fort chantantes. Certaines sont inspirées par le Congo : elles balancent alors naturellement et font la part belle aux rythmes ensemencés avec juste ce qu’il faut de percussions exotiques et un Jan de Haas qui, sur sa batterie, joue la souplesse avant tout. Parfois, elles font appel au chant sobre mais très coloré de Barbara Wiernik (Coumaya) qui s’intègre très bien dans les souvenir africains du compositeur. D’autres sont simplement de belles ballades introduites pas des thèmes accrocheurs comme ce Sale Affaire dont la ligne mélodique, jouée au soprano par Daniel Stokart, rappelle dans toute sa pureté le Concerto d’Aranjuez. Ailleurs encore, c’est Peter Hertmans qui fait surgir quelques fulgurances avec ce son électrique particulier qu’on a plutôt coutume à entendre dans le jazz fusion. La musique se fait alors plus élastique avec une tendance groove comme ce Jardins Suspendus qui clôt le disque toutes voiles dehors et fait regretter que le voyage soit déjà fini. La contrebasse du leader bien mixée dégage un son rond qui lie le tout avec un bel allant en livrant au passage quelques mesures improvisées (y compris à l’archet sur le Chant des Sirènes) et beaucoup de moments d’interaction rythmique inspirés. A la fois lyrique, varié et plein de relief, le disque s’écoute avec un réel plaisir : avec son petit côté touche à tout, il ravira les amateurs d’un jazz séduisant et ouvert. Celui-ci, je le conseillerais bien dans ma sélection de compacts d’initiation au jazz. C’est vous dire ! [ Commander ]


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