Prog et Cinéma

(une petite lucarne ouverte sur autre chose)



Peter Gabriel : BirdyContrairement au Jazz et aux jazzmen qui ont été abondamment sollicités pour composer les bandes sonores de films célèbres, le Rock progressif et ses artistes n’ont que très peu été employés dans le milieu du cinéma. Il n’en reste pas moins qu’épisodiquement, quelques groupes célèbres font quand même une apparition parfois remarquée au sein des musiques de films modernes et pas des moindres : on se souvient par exemple de Everything In Its Right Place de Radiohead dans Vanilly Sky (Cameron Crowe, 2001), de Peter Gabriel avec entres autres I Have The Touch dans Phenomenon (Jon Turteltaub, 1996), The Tower That Ate People dans Red Planet (Antony Hoffman, 2000) et Solsbury Hill dans le même Vanilly Sky, de Heat Of The Moment interprété par Asia dans le fantaisiste The Matador (Richard Shepard, 2005), de Radiohead encore avec Treefingers pour l’étrange Memento de Christopher Nolan (2000) ou de I've Seen All Good People du groupe Yes dans l’excellent Almost Famous (Cameron Crowe, 2000). Certains artistes ont même franchi le pas en s’essayant à des bandes originales complètes comme Peter Gabriel pour The Last Temptation Of Christ (Martin Scorsese, 1998) et Birdy (Alan Parker, 1984), Keith Emerson pour Inferno (Dario Argento, 1978) et Nighthawks (Bruce Malmuth, 1981) ou Pink Floyd pour les célèbres More (1969) et La Vallée (1973) de Barbet Schroeder. Il faut quand même reconnaître qu’il s’agit là de cas singuliers s’expliquant sans doute par des coups de cœur de la part de réalisateurs appréciant ce genre de musique. Car le Progressif, contrairement au Jazz, ne constitue pas un genre adapté à l’illustration sonore de films : au lieu de créer une ambiance (souvent dramatique dans le cas du Jazz abondamment utilisé dans les films noirs), il risque plutôt d’accaparer toute l’attention du spectateur au détriment des images et du récit. Par ailleurs, si quelques notes de Jazz suffisent pour mette en valeur une scène (citons Miles Davis improvisant sur les images du magnifique Ascenseur pour l’échafaud), le Prog joue au contraire sur le temps pour installer une atmosphère, ce qui ne pourrait convenir à la rigueur que pour certains plans particuliers : la villa au bord du désert de Zabriskie Point (Michelangelo Antonioni, 1970) explosant au ralenti sur la musique orgasmique du Pink Floyd par exemple.

Pourtant, il est un sous-genre du Prog qui a séduit les réalisateurs : c’est la musique planante ou "ambient" qui, par sa capacité à générer des climats singuliers, a transcendé d’innombrables scènes cinématographiques dont certaines comptent, sinon parmi les plus belles, au moins parmi les plus émotionnelles du septième art. Qui ne se souvient de l’extrait de Tubular Bells de Mike Oldfield qui accompagne les longs travellings de L’Exorciste de William Friedkin (1973) et contribue grandement à son atmosphère oppressante, de la file interminable des conquérants espagnols d’Aguirre (Werner Herzog, 1972) descendant les Andes dans les nuages sur la plainte électronique infinie de Popol Vuh ou encore de Brian Eno et de son fameux thème de La Prophétie dans Dune (David Lynch, 1984). A côté de ces grands classiques, on pourrait citer des dizaines d’autres exemples plus ou moins connus comme Terje Rypdal (Mystery Man et Last Nite dans Heat), Brian Eno (An Ending dans Traffic), Wendy Carlos(The Shining), Mark Snow (X-Files), John Carpenter (Escape From New York, Prince Of Darkness), John Harrison (Creepshow), Popol Vuh (Nosferatu, Coeur de Verre, Fitzcarraldo), Mark Isham (Crash), Kitaro (Heaven And Earth) et bien d’autres. L’un des plus célèbres parmi les groupes ayant percé au cinéma dans le style planant électronique est sans conteste Tangerine Dream qui a écrit au moins deux grands scores pour l'écran : Sorcerer (William Friedkin, 1977) et Thief (Michael Mann, 1981). Mais le plus connu du grand public reste bien sûr Vangelis avec au moins quatre bandes devenues légendaires : Chariots Of Fire (Hugh Hudson, 1981), Blade Runner (Ridley Scott, 1982), Alexander (Oliver Stone, 2004) et ce qui reste à ce jour sa plus belle réussite pour le septième art : 1492 Conquest Of Paradise (1992) de Rydley Scott.

On trouvera ci-dessous quelques albums de musiques de film réalisés par des auteurs qui n’appartiennent pas au monde du Rock mais qui ne laisseront probablement pas indifférents les amateurs de Progressif. D’abord, la plupart de ces bandes ont servi à accompagner des films étranges ou fantastiques, de science-fiction, de fantasy ou tout simplement des récits historiques qui constituent bien souvent la base des petites histoires du Prog. Beaucoup d’entre elles sont évocatrices de grands espaces, de batailles épiques, d’aventures merveilleuses et recèlent dans les replis de leurs mélopées des sentiments et des émotions aussi violentes que diverses. Ensuite, les compositeurs de ces bandes y ont développé des idées nouvelles qui rompent définitivement avec les traditionnels orchestres bruyants et pompeux qui accompagnaient jadis ce genre de spectacle. Il y ont par exemple inclus des synthétiseurs, des percussions exotiques, des instruments ethniques de diverses origines ou des chants antiques récupérés aux quatre coins du monde. De plus, réalisés dans de grands studios avec des moyens souvent considérables, leur production est évidemment monstrueuse. Enfin, ces disques sont conçus comme de petites symphonies qui s’écoutent très bien même sans le support des images auxquelles elles resteront pourtant à jamais associées. Une chose est certaine : que vous ayez vu les films ou pas, ces musiques-là vous en mettront plein les oreilles.

Un dernier facteur qui pourrait inciter les plus réticents à découvrir quelques bandes originales de film, c’est de savoir que beaucoup de leurs compositeurs apprécient le Rock progressif et qu’ils y ont même parfois investi de leur talent contribuant ainsi à des réalisations appréciables. Décédé en 2003, Michael Kamen par exemple, célèbre auteur des scores de The Dead Zone (1983), Brazil (1985), Die Hard (1988), Robin Hood: Prince of Thieves (1991) et Don Juan DeMarco (1995), fut aussi l’orchestrateur attitré de Pink Floyd avec qui il a collaboré sur trois albums : The Wall, The Final Cut et The Division Bell. En plus de ses réalisations pour des artistes de Rock mainstream comme Eric Clapton, Aerosmith, David Bowie, Sting ou Metallica, il s’est aussi associé avec Queen pour la bande sonore de Highlander. Moins connu mais tout aussi important, il avait une relations particulière avec le groupe de Prog Métal Queensryche pour qui il s’est occupé des arrangements et des orchestrations sur The Warning, Operation: Mindcrime, Silent Lucidity et Operation: Livecrime. Il a même co-écrit un titre avec le groupe (Real World) que l’on peut retrouver sur la bande originale de Last Action Hero sorti en 1993. Danny Elfman, surtout connu pour ses fréquentes collaborations avec le réalisateur Tim Burton (Batman, Beetlejuice, Edward Scissorhands…) fit partie pendant dix-sept années du groupe Oingo-Boingo dont la musique surréaliste et inclassable doit beaucoup à l’univers bizarre de Frank Zappa. Hans Zimmer, compositeur de quelques uns des grands scores du cinéma comme Rain Man (1988), The Lion King (1994), The Rock (1996), The Thin Red Line (1998), Pearl Harbor (2001), Gladiator (2000) et The Last Samurai (2003), commença sa carrière musicale en tenant claviers et synthés pour Ultravox, The Camera Club et surtout The Buggles avec Geoff Downes (Asia et Yes) et Trevor Horn (Yes). Pour la petite histoire, c’est Russell Mulcahy, qui réalisa le clip de Video Killed The Radio Star pour les Buggles (la première vidéo ayant été diffusée sur MTV en août 1981) mais c’est Michael Kamen que Mulcahy choisira pour sonoriser les aventures de Connor MacLeod dans son Highlander en 1986. John Murphy, auteur des scores de 28 Days Later (2002, qui inclut aussi le titre An Ending de Brian Eno) et de Basic Instinct II (2006) joua avec le duo électronique Orchestral Manoeuvres In The Dark. Le guitariste sud-africain Trevor Rabin, guitariste de Yes de 1983 à 1995, est davantage connu dans le monde du septième art pour ses bandes de films célèbres comme Con Air (1997), Armageddon (1998), Enemy of the State (1998), Deep Blue Sea (1999), Gone in 60 Seconds (2000), The 6th Day (2000) American Outlaws (2001), Exorcist: The Beginning et National Treasure en 2004. Le compositeur japonais Ryuichi Sakamoto, auteur des scores de The Last Emperor (1987) et The Little Buddha (1993) de Bernardo Bertolucci, de High Heels (Pedro Almdovar, 1991) et de Snake Eyes (Brian de Palma, 1998) ainsi que le trompettiste Mark Isham (Timecop, 1994 ; Blade, 1998 ; Crash, 2004) ont tout deux collaboré ou joué avec l’artiste de Rock progressif David Sylvian. Isham est par ailleurs également l’auteur du Silent Way Project en hommage au Miles Davis électrique. Le Français Eric Serra, partenaire de Luc Besson (Subway, Le Grand Bleu, Nikita, Léon, Le Cinquième Elément, Jeanne D'Arc/The Messenger …), est aussi un spécialiste de la basse fretless ayant fait ses armes dans des groupes de Jazz-Rock et a notamment joué avec Didier Lockwood et Magma… On pourrait encore citer beaucoup d’autres exemples mais cette page n’y suffirait pas et la liste en s’allongeant deviendrait vite fastidieuse à lire. En attendant que quelqu’un fasse un jour un compte-rendu exhaustif des liens entre Prog et cinéma (pour autant que ce soit possible), mieux vaut en rester là et passer aux suggestions musicales !

Bernard Hermann : Psycho (Varese Sarabande), 1960 (Joel McNeely & Royal Scottish National Orchestra - 1997)

Cette musique, qui fut composée par Bernard Hermann en 1960 pour le plus célèbre film d’Hitchcock, reste l’une contributions musicales au septième art parmi les plus novatrices, influençant de façon rémanente les scores de la plupart des futurs thrillers (sans compter les groupes de Prog comme Univers Zero par exemple). L’utilisation d’un simple et unique orchestre à cordes pour transcrire les instincts primaires des protagonistes (même quand ils ne sont pas spécifiquement décrits dans le film) est géniale. Instinctive, manipulatrice, sombre, abusant d’ ostinati inquiétants, horrifique parfois (les violons hurlants accompagnant la célèbre scène de meurtre au couteau dans la douche ou celle du détective Arbogast dévalant l’escalier), la musique explore toute la gamme des émotions humaines, de la cupidité à la peur en passant par la folie et jusqu’au romantisme le plus désuet (Marion et Marion and Sam). Cette nouvelle version interprétée par le Royal Scottish National Orchestra conduit par Joel McNeely est en tout point superbe. Non seulement, elle respecte la partition initiale et offre deux titres oubliés en plus, mais le mixage et la production sont tellement clairs et limpides (avec une séparation remarquable des instruments) qu’elle éclipse définitivement tout autre réenregistrement effectué dans le passé y compris celui de Hermann lui-même à la tête du National Philharmonic Orchestra. Quant à la véritable bande originale du film, elle n’a été éditée qu’en bootleg avec une qualité sonore déplorable.

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Ennio Morricone : The Good, The Bad & The Ugly (Capitol), 1966 - réédition 2004 avec 10 titres supplémentaires

Morricone persiste dans le style surréaliste des musiques composées pour les deux précédents westerns spaghetti de Sergio Leone. Conservant les orchestrations galopantes et les guitares électriques, il pousse la formule dans la démesure : plus de chœurs, plus de solistes, plus de bruitages et plus d’inventivité. Le cri du coyote dans le thème principal est resté dans toutes les mémoires comme le leitmotiv du film mais cette bande offre bien davantage. Du chant désespéré des soldats confédérés (The Story Of A Soldier) aux voix d’outre-tombe du Chariot Des Esprits, du maëlstrom engendré par L’Extase De l’Or aux lamentations des guitares espagnoles de Padre Ramirez, ces aventures sonores illustrent à la perfection les caractères (chaque personnage a son instrument) et les ambiances d’un film conçu comme une satire sauvage. A l’instar de la fameuse impasse mexicaine piégeant en finale les trois protagonistes enfin réunis, cette musique séquestre dans ses 21 variations tous ceux qui l’ont entendue.

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Basil Poledouris : Conan The Barbarian (MCA / Milan), 1982

A juste titre, la musique du célèbre Conan de Milius est restée longtemps l’archétype des scores pour les films de fantasy. Avec un orchestre de 90 musiciens et un chœur à 24 voix, la bande originale composée par Basil Poledouris a été conçue pour un film visuel où les dialogues étaient tenus par le réalisateur comme superflus. A la fois triste, puissante et dramatique, la musique s’incruste dans les paysages désolés de cette histoire tragique peuplée de romances, de héros, de magiciens et de batailles épiques. C’est elle finalement qui donne toute sa noblesse et sa puissance à un film devenu culte malgré ses innombrables imperfections.

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Jerry Goldsmith : Under Fire (Warner Bros.), 1983

Ce film de Roger Spottiswoode se passe dans un pays d’Amérique Latine et Jerry Goldsmith fut tout naturellement branché sur la musique des Andes et les flûtes indiennes. Et puis, quelqu’un a eu l’idée géniale d’inviter le guitariste Pat Metheny qui délivre ici une partition en dehors de son jazz fusion habituel, s’incrustant avec simplicité et classicisme au milieu des castagnettes et des rythmes latins. Le compositeur d’Alien et de The Omen a ensuite ajouté dans le mix quelques effets de synthétiseurs dont il a le secret et le tour était joué : Under Fire est un disque qui évoque plein de références mais qui ne ressemble à rien de connu.

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Angelo Badalamenti : Twin Peaks & Fire Walk With Me (Warner Bros.), 1990 & 1992

Dans le monde de Twin Peaks, rien n’est réel. Le réalisateur a confié l’illustration sonore de cette étrange histoire à son musicien fétiche déjà auteur du célèbre score de Blue Velvet. Tout se passe ici sous la surface des choses et la musique, d’une lenteur désespérante, se synchronise parfaitement avec le récit d’un mystère sans fin. Introspective et mélancolique, instrumentale ou chantée, un peu jazzy et suspendue entre rêve et réalité, elle suggère un univers immobile où il se passe constamment quelque chose derrière le coin dont on se saura jamais rien.

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Trevor Jones / Randy Edelman : The Last Of The Mohicans (Morgan Creek), 1992

Les deux compositeurs crédités sur la pochette n’ont pas travaillé ensemble : la production du film s’étant révélée désastreuse, Trevor Jones n’a pas eu le temps de terminer sa partition si bien que Michael Mann a dû faire appel à Randy Edelman pour écrire quelques pièces supplémentaires. Ce dernier a produit une musique calme et méditative convenant bien à certaines scènes (le beau thème de Cora et River Walk And Discovery) mais ce sont définitivement les compositions de Trevor Jones qui font la distinction de ce score dédié aux grands espaces du Nouveau Monde où s’affrontent avec sauvagerie aussi bien les cultures natives que celles importées. La mélopée qui accompagne, jusqu’à la confrontation finale, la longue et spectaculaire course poursuite dans les Smoky Mountains de la Caroline du Nord est tout simplement inoubliable. Elle constitue l’une des plus impressionnantes associations sons / images de toute l’histoire du cinéma. Il y a des films qui incitent à réécouter plus tard leur musique. Celle-ci vous donnera envie de revoir le film.

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Elliot Goldenthal : Heat (Warner Bros.), 1995

Avec des scores orchestraux, dissonants et chaotiques à son actif comme ceux d’Alien3, Demolition Man et Batman Forever, il est surprenant que Michael Mann ait fait appel à Elliot Goldenthal pour son film noir, violent et stylé racontant la confrontation tragique entre De Niro et Pacino au cœur d’une ville (L.A.) filmée à la perfection. Pourtant, se pliant à la volonté du réalisateur, Goldenthal a conçu une musique sans thème, synthétique, fascinante, froide comme les couleurs métalliques des images, très proche d’une musique ambient moderne. En plus, pour compléter sa bande sonore, Michael Mann a incorporé des pièces interprétées par des artistes divers dont Brian Eno, U2, Terje Rypdal, Moby et Lisa Gerrard. Souvent, la juxtaposition de genres disparates fonctionne mal mais ici, les titres ont été choisis pour leur cohérence avec la composition originale si bien que l’album s’écoute comme une longue suite homogène d’une incroyable densité. Quand une musique s’inscrit dans une vision forte, elle atteint son objectif plus facilement que d’autres.

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James Horner : Braveheart (Decca/London Records), 1995

Beaucoup accusent James Horner de recyclage et de plagiat mais ça ne l’a pas empêché de réaliser quelques 75 projets dont beaucoup comptent parmi les grands scores du cinéma moderne (Willow, Legends Of The Fall, Appollo 13, Titanic ). Avec ses thèmes romantiques mis en valeur par des arrangements de cordes exceptionnels, sa subtile combinaison entre orchestre et instruments ethniques comme la cornemuse et la flûte japonaise sakuhashi, ou ses chœurs et ses percussions tonnant au coeur des batailles, Braveheart est en tout cas une réussite exceptionnelle. Qu’importe si Horner a puisé, volontairement ou non, quelques idées dans l’œuvre de Gustav Holst ou de John Barry ou même dans ses anciennes partitions, une chose est sûre : si, à la fin du film, le cri libertaire (freedom !) de William Wallace n’avait été souligné par une telle puissance orchestrale, un doute aurait pu subsister sur la victoire finale des Ecossais. On appréciera la pochette de l'édition européenne qui, par rapport à la version internationale, a privilégié l'aspect romantique du film et l'actrice Sophie Marceau quand même plus belle à regarder qu'une épée en fer du 13ème siècle.

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Danny Elfman : Sleepy Hollow (Hollywood Records), 1999

Sleepy Hollow est un film d’horreur tiré d’une nouvelle de Washington Irving mais il est réalisé par Tim Burton et joué par Johnny Depp et Christina Ricci dans l’esprit des anciennes pellicules de la Hammer (le vieux vampire Christopher Lee lui-même y fait une apparition remarquée en juge) : l’atmosphère et le visuel sont ici aussi importants, sinon davantage, que le récit. Et le moins qu’on puisse dire est que la musique donne une profondeur inquiétante aux paysages sombres, aux cavaliers qui surgissent de l’ombre, aux arbres torturés de la forêt et au village noyé dans un brouillard mystérieux. Bien sûr, il y a des chœurs d’enfants, un orgue menaçant, des cuivres qui surgissent comme des fantômes et des solos de violons sinistres qui procurent le frisson car Danny Elfman s’est plié au jeu sans second degré, rappelant parfois le grand Bernard Hermann, intensifiant le suspense, créant la bande sonore parfaite d’un film fantastique à vocation esthétique. Les magnifiques textures orchestrales accentuent magistralement l’aspect gothique du spectacle et persistent dans la mémoire aussi longtemps que les images qu’elles ont sublimées.

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Hans Zimmer / Lisa Gerrard : Gladiator (Decca), 2000

Pour ce péplum moderne qu’est Gladiateur, Hans Zimmer a conçu une musique toute en nuance qui évoque aussi bien les colonisations africaines de l’empire romain que les grandes batailles épiques déployées dans les terres du Nord ou la montée des âmes des centurions morts aux Champs-élysées. Parfois élégiaque (quand la voix lyrique de Lisa Gerrard s’impose au-dessus de l’orchestre) mais le plus souvent sombre, menaçant et dramatique, ce score épouse les superbes images de Rydley Scott et en amplifie considérablement l’impact. S’inspirant subtilement de ses classiques (Wagner, Prokofiev, Stravinsky et surtout Les Planètes de Gustav Holst et Mars - Bringer of War plus particulièrement), le compositeur allemand, qui commença sa carrière en compagnie de Trevor Horn et de Geoff Downes au sein des Buggles, a réussi, grâce à une alchimie moderne associant grand orchestre, percussions, instruments inusités, voix et influences orientales ou espagnoles, à produire une musique fraîche et majestueuse apte à hanter les rêves de tous les amateurs de grandes épopées.

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Howard Shore : Lord Of The Rings, The Fellowship Of The Ring (Reprise), 2001

Incontournable, cette bande originale de Howard Shore s’inscrit dans l’intemporalité. Elle évoque aussi bien le moyen âge et la renaissance que Prokofiev ou Wagner sans oublier quelques accents celtiques dus à la voix céleste de Enya qui chante sur deux titres. La force gothique de ce monument à la gloire de la fantaisie est à la hauteur du film consacré à la Terre du Milieu. Les chœurs tonnent quand les armes s’entrechoquent tandis que la symphonie se fait pastorale quand on entre au pays des elfes. Suivant à la lettre les aventures du roman de J.R.R. Tolkien, le score de cette première partie du cycle du Seigneur des Anneaux a fait souffler un vent nouveau sur le cinéma de l’imaginaire. Vingt ans après Conan, il était plus que temps !

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Hans Zimmer : King Arthur (Hollywood Records), 2004

Certes, cet Arthur-ci n’a rien de féérique : la magie est inexistante, Kamelot est remplacé par des casernes moyenâgeuses et Merlin est un demi sauvage qui se cache dans la forêt sans parler du drôle d’habit futuriste fièrement arboré par l’héroïne. Quant à Hans Zimmer, il nous refait tout simplement le coup de Gladiator mais cette fois avec un petit accent celtique et en recrutant la chanteuse Moya Brennan en lieu et place de Lisa Gerrard. Il n’empêche que ça fonctionne! Propulsées par un grand orchestre, des basses synthétiques, des percussions et des chœurs, les charges deviennent glorieuses, les luttes titanesques et les longues chevauchées dans les grandes plaines herbeuses élégiaques. Pendant la fameuse confrontation avec les Saxons sur le lac gelé (le clou du film), la musique atteint une puissance dramatique phénoménale comme si elle voulait à elle seule briser l’épaisse croûte de glace sous les pieds des barbares. Peu de place pour les solos dans cet album, l’orchestre compact au son accentué par une subtile électronique est le maître incontesté d’un score aussi menaçant que l’épée d’Arthur tournoyant au-dessus des têtes des envahisseurs apeurés.

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